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Y'en a vraiment qui débloguent...

Journal de bord d'un navigateur du web. Commentaires sur l'actualité, la société, la politique, les femmes, le sexe, l'âge, la vie...

Viva la (co)vida : nous sommes tous des zéros

Laurence Peignot, généraliste n'applaudit plus ses confrères. Interrogée par Le Point, elle explique : « Ça va sûrement choquer que je dise ça, mais ceux qui se font passer pour des héros abusent. » Selon elle, d'autres médecins sont aussi « un peu gênés avec ça. À l'hôpital, beaucoup considèrent qu'ils n'ont fait que leur boulot. Ils l'ont très bien fait, certains ont pris des risques, mais, à un moment, il faut dire les choses : on fait le job et c'est normal. »

Elle en veut à ceux qui « diffusent des informations complexes, encore non abouties scientifiquement, contribuant à entretenir des peurs irrationnelles face à la maladie et à la mort. » Et que penser du gourou Raoult qui, lui, entretient des espoirs surdimensionnés avec son gri-gri parfumé à la chloroquine ?

« Tous les jours, s'inquiète-t-elle, je vois défiler dans mon cabinet des gens angoissés. L'autre jour, un étudiant en panique m'a confié ne pas être sorti de son studio durant six semaines, pas même pour aller faire ses courses. Des profs, des salariés me demandent des certificats pour ne pas retourner travailler. Je vois des patients effrayés, renfermés sur leurs angoisses de mort, qui préfèrent tout arrêter, garder leurs enfants à la maison plutôt que de ressortir, vivre, bosser, retrouver leurs proches et leurs amis. Je trouve ça triste. Quand on est en bonne santé, on ne devrait pas se complaire dans le confinement, le repli et la docilité. » 

Elle poursuit : « la santé est un tout. Ce n'est pas seulement se prémunir d'une maladie ou d'une infirmité, c'est être bien dans son corps, sa tête, son environnement social et familial. [...] Notre boulot, c'est aussi de faire en sorte que la vie redémarre. Pas de faire peur aux gens à la télévision. Nous devons être des filtres, pas des générateurs d'angoisse. »

Hier, elle a « vu passer un tweet » dans lequel un urgentiste de l'AP-HP réclamait des fonds pour acheter des stéthoscopes. « Je me suis dit : il abuse carrément, ce mec. Des tas de gens sont dans la panade et attendent de pouvoir rebosser et, nous, on est en train de demander des sous en jouant sur la peur des gens. » Elle ironise : « Tout le monde a compris que nous étions indispensables. Ce n'est peut-être pas la peine d'en rajouter et d'en profiter ! »

Selon elle, il y aurait « un décalage entre ce que rapportent certains médias et la réalité du terrain. Les internes que je côtoie me racontent leur stage hospitalier : les services qui ont été réorganisés pour accueillir les patients atteints du Covid ont été pleins durant deux ou trois semaines, au plus fort de la vague. Mais, depuis un mois, ce n'est plus du tout le cas. Les urgences sont désertes ; en tout cas, ceux qui, parmi mes patients, y ont fait un passage ont été traités plus rapidement que jamais. Je regrette donc de voir certains de mes confrères inquiéter davantage une population déjà à cran pour arriver à leurs fins, aussi légitimes soient-elles. »

Et à ceux qui s'inquiètent des risques elle répond que « le risque zéro n'existe pas. Certains patients viennent nous voir pour éviter d'avoir à en prendre en nous demandant un arrêt, par exemple. Ce que j'aimerais, c'est qu'ils assument ce risque, en tout cas quand leur santé le leur permet. À nous de faire en sorte que ce risque soit limité au maximum. De toute façon, on ne pourra pas s'empêcher de vivre indéfiniment. Il y a un équilibre à trouver entre le risque lié au virus et les risques que l'on prend en prolongeant l'enfermement. »

Serions-nous devenus tous des zéros… risques, terrés dans leurs chambres aseptisées, ne sortant qu'en scaphandre, forniquant en combinaison de latex comme des poupées SM ?

Nous sommes tous devenus des zéros… sauf moi. Le masque me donne chaud et me fait transpirer. Les gens me regardent bizarrement, s'écartent plus qu'il ne faut (jusqu'à dix mètres pour certains… j'ai mesuré) car ils me croient malade. J'en présente les stigmates : fièvre et masque. Au lieu d'un seul, me voilà confronté à deux risques : le covid ou me faire lyncher… à distance, ça va de soi.

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