Le Bureau des réassignations sexuelles

C'est mieux que le Bureau des légendes ! Rappelez-vous... ce dernier est un bureau des services secrets chargés de fournir à ses agents une nouvelle identité avec une biographie fictive en PJ. La série française ayant apparemment eu un certain succès auprès de l'honorable Institution, un bureau du Parlement européen propose, en complément, de changer de sexe selon l'envie du moment ! 

L'idéal serait que chaque Européen (le terme fait débat puisqu'il exclut les non-Européens qui résident illégalement ou non sur le territoire de la Communauté qui, apparemment, ne doit plus être appelée ainsi puisque cela revient à exclure ceux qui n'en font pas partie, etc., etc.,... j'ai l'impression que le raisonnement se mord la queue… pour rester dans le thème) puisse changer à volonté d'apparence comme dans les films de SF.

Ce nouveau traité de savoir-vivre conseille, quand on rencontre quelqu'un pour la première fois, même si son apparence laisse peu de place au doute (je dis toujours "Madame" à un travesti… sauf, par charité, quand ce n'est pas crédible), de lui demander : "Comment dois-je vous appeler ? Monsieur ? Madame ? Non genré ?"... Je ne suis pas certain que cette question soit accueillie avec toute l'ouverture d'esprit nécessaire par les personnes (j'ai fait attention...) que je rencontre quotidiennement et qu'on ne me qualifie pas d'un terme qui fait référence à mon orientation sexuelle supposée…

La notion de "sexe biologique" est désormais proscrite. Il faut parler de "sexe assigné à la naissance". Sur Meetic, par exemple, c'est très apprécié au début d'une rencontre : "Quel est ton sexe assigné à la naissance, si je peux me permettre ? Je ne voudrais pas me tromper en me fiant seulement à tes photos." D'ailleurs je m'étonne que "sexe" soit toujours employé puisqu'il est de sexe… de genre masculin. Solution : "Quel(le) est ta-ton sexe assigné(e) à la-le naissance ?" Même chose avec le prénom. Si une personne souhaite en changer, il ne faut pas lui demander son "vrai prénom" (ce qui suggère que son nouveau prénom est le faux), mais son "prénom officiel" (celui inscrit dans ses documents d’identité). "Hermaphrodite" est également banni pour une personne. On parle d'"intersexe". Hermaphrodite est "incorrect et offensant" car ce terme "désigne en réalité (NL : de quelle réalité parle-t-on ? N'y a-t-il pas une troisième dimension ?) les espèces animales ou végétales chez qui on observe des caractéristiques sexuelles à la fois pleinement mâles et femelles, ce qui est physiologiquement impossible chez l’humain (NL : vraiment ?)".

En y réfléchissant, je crains que le titre de ce billet ne soit en infraction avec la législation européenne… car ré-assignation pose problème… Si "sexe assigné à la naissance" est admis comme une fatalité inhérente au règne encore prégnant du patriarcat, "ré-assignation", qui suppose une intervention chirurgicale, est une atteinte aux droits de… j'hésite… genre humain, peut-être (ça fait quand même un peu Internationale…). Les expressions à éviter sont : chirurgie de réattribution ou réassignation sexuelle (CRS... NL: = SS), chirurgie de changement de sexe, opération de réassignation ou réattribution sexuelle, opération de changement de sexe, réassignation sexuelle chirurgicale préopératoire ou postopératoire… Elles sont à remplacer par : "chirurgie d’affirmation de genre". C’est positif, on sent que la personne se prend en main, qu'elle s’affirme… jusqu'à ce qu'elle déprime en constatant que tout ne fonctionne pas comme prévu...

Tout cela me paraît fort bien pensé mais je m'étonne pourtant qu'un cas, marginal sans doute mais ô combien symbolique, n'ait pas été envisagé par le Parlement européen : celui de l'homme invisible. À peine ai-je terminé ma phrase, que je sens déjà, pointé sur moi, le bréviaire à trois coups du Parlement européen... "Homme" n'a pas sa place dans cette phrase (ni bientôt sur Terre...) ! Je veux bien revoir ma copie, mais comme IEL (j'ai suivi un programme de réorientation textuelle en signe de bonne volonté) est invisible comment identifier son sexe… de naissance ?

Je sens que vous avez la solution… les bandelettes façon momie. Sans doute, mais vous n'ignorez pas que les travestis compriment, avec divers accessoires, cet attribut sexuel secondaire (que j'ai du mal, personnellement et sans me vanter, à faire passer au second plan…) afin de parachever leur apparence féminine… À ce propos, j'ai quelques doutes sur la facilité de l'opération inverse pour ces femmes qui veulent ressembler à un homme dans ses moindres détails… Et je m'interroge, en mobilisant toutes mes ressources conjecturales, sur la réponse chirurgicale qu'on peut apporter à quelqu'un qui veut ne ressembler à RIEN ?