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Y'en a vraiment qui débloguent...

Journal de bord d'un navigateur du web. Commentaires sur l'actualité, la société, la politique, les femmes, le sexe, l'âge, la vie...

Les tribunaux malades des pesticides

Je me demande si je ne suis pas un enfant du libéralisme rural, autrement dit de Paul-Louis Courier et du calva. Un milieu où il était courant de penser qu'en France, la fonction publique fut inventée pour permettre aux fils de paysans d'échapper aux travaux des champs. Et, chez les plus extrémistes, que le périmètre fut ultérieurement élargi afin que les fonctionnaires échappent à tout travail comme les nobles d'Ancien Régime. En fait, je crois bien que j'étais entouré des derniers koulaks, ceux qui avaient échappé à la faucheuse bolchevique. Après avoir massacré trois à six millions d'Ukrainiens à l'été 1932 (à partir d'un certain seuil, on ne compte plus), les boutchers s'étaient arrêtés, repus, à la frontière polonaise.

Cela étant, les bolcheviks ont toujours eu la cote en France, à toutes les époques depuis 1917 et même chez ceux qu'on pourrait croire les plus éloignés de leur idéologie comme Marine Le Pen ou Éric Zemmour… sûrement le côté sanglant et le mépris totalitaire du prochain (sauf les fœtus). Quand on a plus de nazis présentables sous la main, il faut bien faire avec ce qui reste en magasin (ça s'appelle "faire les poubelles de l'histoire") : des ex du KGB maquillés en oligarques… les Khmers rouges n'ayant été malheureusement qu'un feu de paille… de riz.

Un peu d'histoire : à la fin des années 1920, l'URSS avait retrouvé sa production agricole et industrielle d'avant la Révolution grâce à la NEP (Nouvelle Politique Économique), libéralisation économique à la sauce bolcho. Mais, pris d'un accès de dialectique galopante, Staline craignit que la NEP ne favorise l'avènement d'une nouvelle bourgeoisie paysanne qui pourrait un jour triompher du communisme. Il freina des quatre fers et lança un premier plan quinquennal. Les paysans aisés, surnommés "koulaks" (d'un mot russe qui désigne un prêteur sur gages… ça sent le crypto-antisémitisme), furent accusés de faire obstruction à sa politique au nom de leurs intérêts particuliers. Il décida alors, avec cette merveilleuse simplicité d'esprit des grands criminels, "l'élimination des koulaks en tant que classe" (façon politiquement correcte de ne pas dire "individus") et l'intégration de tous les autres paysans dans de grandes fermes collectives (kolkhozes) ou fermes d'État (sovkhozes). Cependant, à l'Ouest, en Ukraine, de fortes résistances subsistaient car la paysannerie y avait développé au fil de l'Histoire des structures comparables à celles que l'on rencontre en Europe : petits propriétaires attachés à leur terre, à leur pope (le curé orthodoxe) et à leur église. C'est ainsi qu'en 1932, le pouvoir soviétique abattit son marteau sur les paysans d'Ukraine, coupables de n'en faire qu'à leur tête et suspects de nationalisme. 

C'est curieux… ça me rappelle quelque chose ! Comme on dit : l'Histoire repasse les plats…

Petit aparté… un nouveau Tweet de l'ambassadeur russe en France pour léninifier… lénifier le précédent ("Massacre de Boutcha, plateau de tournage") : "Les rues de Boutcha manquent cruellement de démonstrations d'affection"... on progresse.

Bien que s'en étant affranchi depuis belle lurette, la fonction publique française a gardé un mépris tenace pour le monde agricole, l'autosuffisance alimentaire et les marchés. Tout est bon pour… l'exterminer, à titre provisoire. Pour mémoire, l'extermination libératrice des koulaks répondait à l'obsession programmatique socialiste d'annihiler tout esprit d'initiative, tout désir de liberté, toute volonté d'indépendance chez les paysans.

Un décret sournois du 16 mars 2021 a donc élargi les compétences de plusieurs tribunaux en matière d'atteinte à l'environnement. "Élargir une compétence" ne veut pas dire "élargir ses compétences" au sens "d'améliorer ses connaissances". Cela signifie avoir le droit "d'aller au-delà de sa compétence" cette dernière étant déjà envahissante comme le chiendent. Ils s'appuient sur une milice publique, l'Office français de la biodiversité (OFB… il n'y a que le S qui manque). Ses 1 700 inspecteurs peuvent conduire des enquêtes comme des spetsnaz. Le recrutement des agents de l'OFB rappelle celui des gardes forestiers sous le Consulat. On les enrôle sur la base de critères plus politiques que techniques. Bernard Lorentz écrivait en 1801 "L’ignorance des forestiers est une des premières causes de la dégradations de nos forêts." Les agents de l'OFB ne sont donc ni naturalistes, ni biologistes mais plutôt adeptes des sports de combat bios.

Note : cela ne leur réussit pas toujours. On déplore la mort de l'un d'entre eux après une altercation avec un ours. Le plantigrade n'a visiblement pas apprécié qu'on mette en doute sa connaissance de la biodiversité. 

La conduite de la guerre contre les chouans… je veux dire les paysans, se fait selon plusieurs axes. D'abord par un usage décomplexé des fake news… mais il n'est pas certain que les faussaires soient conscients des simplifications ou des erreurs qu'ils répandent. Car on les sent incapables de faire la différence entre un acide et une base, l'accélération et la vitesse, le diamètre et la circonférence, la cause et la conséquence, la justice et la morale.

Cas d'école… de guerre, cette manœuvre à Grenoble, bastion de la Nouvelle Écologie Réformée.

Les forces en présence : un procureur qui doit justifier sa nouvelle compétence en écologie pour le bon déroulement de sa carrière, sa petite troupe de choc chargé de traquer l'ennemi, c'est-à-dire de dénazifier l'agriculture et, puisqu'on est à la campagne, des corbeaux, qu'on appelle aussi néo-ruraux, qui se font un plaisir de surveiller le seul couillon qui travaille et qui semble être le seul à savoir que son activité est vitale. Face à cette armée, un pauvre petit pomiculteur. 

Comme le raconte Le Point, l'OFB grenobloise, poussée par le procureur Olivier Nagabbo, assume de faire du zèle : le parquet spécialisé vient d'être créé, il faut le nourrir "et faire un exemple". Au matin du 1er avril 2021, trois agents de l'OFB investissent le domaine du pomiculteur, qu'ils accusent de pulvériser massivement un pesticide dangereux pour les abeilles. La presse est convoquée, l'agriculteur placé en garde à vue. Le chef de l'OFB, Sébastien Mollet, déclare : "Cet agriculteur a utilisé des pesticides sur des pommiers en fleurs ! On peut estimer que la totalité des insectes sont morts. C'est une certitude ! Notre expert nous l'a confirmé !".

Aucune preuve à l'appui de cette accusation puisqu'il déclarera à l'audience "ne pas être entré sur la parcelle par peur pour sa propre sécurité, des pesticides ayant été épandus". L'expert, Marc-Édouard Colin, un vétérinaire écarté du CNRS en 2002 en raison de ses positions militantes et antiscientifiques, ne s'est pas davantage déplacé. Dans son rapport, il écrira que "la probabilité pour qu'une butineuse soit tuée mortellement avoisine les 100 %". Que cette affirmation soit fausse n'ébranlera pas le procureur : "Je ne suis pas naïf, j'ai vu sur Arte que les études sur les pesticides sont payées par l'industrie". Comme dirait Poutine : "On donne trop d'importance à la réalité !"

Le pesticide utilisé ce jour-là par l'agriculteur est autorisé car il n'entraîne aucune mortalité. "Ses conditions d'usage doivent être encadrées, mais on n'a jamais observé la moindre mortalité aux doses considérées", confirme Cyril Vidau, spécialiste en écotoxicologie de l'abeille à l'Itsap (Institut technique et scientifique de l'apiculture et de la pollinisation). Il va aussi de soi que si l'agriculteur a pulvérisé un pesticide ce n'était pas pour le voir scintiller sous la lune mais pour protéger ses cultures d'une attaque de pucerons cendrés qui avaient envahi ses pommiers et menaçaient de ruiner sa récolte (le puceron cendré est un des principaux parasites des vergers). 

Un apiculteur, qui installe depuis 10 ans ses ruches au centre des parcelles de pommiers de l'exploitant pour aider à la pollinisation, attestera n'avoir observé aucun trouble dans ses colonies d'abeilles. Pas plus qu'un voisin apiculteur, dont les ruches jouxtent les parcelles.

Ces faits, au tribunal, ne seront pas contestés. Qu'importe. "Il faut faire un exemple", répétera le procureur Nagabbo, qui requerra 100 000 euros d'amende et six mois de prison avec sursis. "Vous avez une BMW. C'est curieux… Un agriculteur peut-il se payer cela ?", dira-t-il au prévenu (on se croirait revenu aux beaux temps de l'URSS quand les enfants des ci-devant bourgeois étaient damnés sur trente générations). Chaque partie civile (les associations Générations futures, à l'origine de la campagne de faux glyphotests, et France Nature environnement) se verront octroyer la somme de 2 000 euros conformément à la jurisprudence "charognards".

À mon avis, il faut simplifier la procédure :

1) si le pomiculteur n'a tué aucune abeille, il doit être condamné pour non-respect des quotas ; le fabricant du pesticide peut aussi être mis en cause pour avoir donné une trop bonne image de la filière (il est sûrement payé par les Américains),

2) si le pomiculteur a tué une seule abeille, il doit s'engager à faire mieux la prochaine fois et recourir à un autre pesticide ; en attendant, il subit des pénalités de retard jusqu'à ce qu'il rattrape l'objectif qui lui était fixé par le plan quinquennal,

3) quand le pomiculteur aura tué plus d'une abeille alors le procureur sera content car il pourra requérir une condamnation exemplaire, avec de la prison à la clé, une amende colossale, la confiscation de ses biens et un sermon en prime. 

Comme le dit un ex-koulak : "Les intrusions dans des élevages, les destructions, les actes d'agribashing ne sont jamais sanctionnés, ou par de vagues travaux d'intérêt général. Des activistes violents peuvent détruire 1 500 tonnes de blé, comme récemment en Bretagne, sans que les autorités trouvent rien à redire. Qui peut encore soutenir, honnêtement, que notre justice est impartiale ?" Mais l'est-elle en Russie ?

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